Tatouage et philosophie
C’est un bien beau métier que nous avons là.
Un métier avec beaucoup de responsabilités. Mais toute la difficulté de ce métier ne réside pas uniquementdans l’obligation d’un résultat esthétique comme
beaucoup pourraient le croire. Le métier de tatoueur est pour 50% un travail d’accompagnement qu’il
ne faut absolument pas négliger. Un accompagnement bien particulier…
Dans notre société occidentale, les rituels tendent à disparaître : (délaissement de la religion, perte
des traditions, etc …) Mais ce sont ces rituels qui ont construit l’Etre humain dans ses rapports
sociaux et son rapport au monde depuis des milliers d’années. L’Être humain est un être de symbole
et ces rituels sont en fait indispensables.
Alors il cherche de nouveaux rites de passage, pour trouver du sens à son histoire.
Et c’est là que le tatouage intervient. Se réappropriant des rites ancestraux, nous cherchons des
rituels symboliques pour marquer nos passages de vie.
C’est pour cette raison que nous, tatoueurs, sommes là pour vous accompagner dans cette étape :
car oui, qu’on en soit conscient ou non, se faire tatouer coïncide toujours à un moment important de
notre vie : le passage à l’âge adulte dans son appropriation du corps, le deuil d’une personne
disparue, d’une séparation, un changement de vie, etc.. Et le choix du tatoueur, celui qui va vous
accompagner dans cette étape, est essentiel.
On à l’habitude d’entendre que le « feeling » est un des points principaux dans le choix de son
tatoueur. Et c’est vrai car le tatoueur à la responsabilité de votre image . Il détient le pouvoir de la
valoriser ou bien de vous faire complexer et de vous faire perdre l’estime de vous-même.
Vous devez être en complète confiance lorsque vous vous faites tatouer car il faut un certain lâcher
prise. A un moment, vous n’aurez plus la maîtrise de la situation lorsque vous vous ferez tatouer. Un
abandon de soi à l’autre qui n’est absolument pas anodin.
La douleur rajoute de la valeur à ce rituel en le rendant plus puissant dans sa symbolique. Une
expression commune dit que « tant qu’on a mal, c’est qu’on est pas mort ». Car oui, souffrir c’est aussi
se sentir vivant. Sentir ses chaires, son corps. Se dépasser physiquement. Un peu comme un sportif
de haut niveau. Ce qui fait toute la force de ce rituel de passage.
On peut donc voir à quelle point la confiance et la bienveillance du tatoueur est importante dans
l’accompagnement car la personne est mise en difficulté par la douleur dans ce moment de
vulnérabilité, de proximité et d’intimité, loin du masque habituellement arboré en société.
C’est d’ailleurs une des raisons pour laquelle le métier de tatoueur est formidable : sur le fauteuil de
tatouage les gens sont vrai. Pas de faux semblant, pas de masque : les gens n’hésitent pas à se
dévoiler, à livrer leurs confidences dans l’intimité de la pièce de tatouage.
Le corps est malmené, l’esprit aussi… et nous sommes là pour vous accompagner dans cette épreuve
du corps et du mental. Marquer sur la peau. La peau est la frontière entre l’intérieur et l’extérieur,
entre le soi et l’autre. Car un tatouage est un acte et un choix personnel certes (j’entends souvent
«c ‘est pour moi que je le fais ») mais pas seulement : c’est aussi un rapport à l’autre, une image que
l’on donne de soi.
La peau est un lien et le tatoueur un guide pour accompagner la personne dans son rapport entre elle
même et son rapport au monde.